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Motion de l’AG des enseignants non titulaires de l’UFR d’histoire de Paris 1

Chers et chères collègues,

L’assemblée générale des enseignants non titulaires de l’UFR 09 de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne réunie le 11 mai 2018 s’associe aux demandes qui ont été faites de la tenue d’une AG de l’UFR la semaine prochaine afin d’aborder à la fois la question des modalités d’évaluations des étudiants et les réformes actuelles de l’université. Nous revendiquons le droit de participer à la prise de décision. Dans le cas contraire, nous nous réservons le droit de ne pas participer aux examens.

Afin d’ouvrir le débat et en vue de cette AG, nous vous prions de trouver ci-dessous un texte d’analyse et de prise de positions de l’assemblée générale des enseignants non titulaires de l’UFR 09 réunie le 11 mai

« Le mouvement contre la loi ORE et contre Parcoursup n’est pas seulement un mouvement qui concerne les candidats à l’entrée à l’Université. Il concerne l’ensemble des personnels de l’enseignement supérieur et de la recherche. En effet, cette réforme s’inscrit dans une longue tendance de diminution des moyens attribués à notre administration, de privatisation progressive de l’enseignement supérieur, de suppression du cadre national des diplômes, c’est-à-dire de la reconnaissance des qualifications par les employeurs à travers les conventions collectives. Elle s’inscrit aussi dans le mouvement plus général d’attaques de la fonction publique et du statut des fonctionnaires, et, pour ce qui nous concerne plus particulièrement, de privatisation rampante de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur et de la recherche et de la mise en cause des concours de recrutement des enseignants.

Les universités connaissent, depuis au moins une dizaine d’année, c’est-à-dire au moins depuis le passage à la RCE1 élargies de profonds changements. La loi LRU de 2007, du fait de l’autonomie budgétaire, a été le moyen pour le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, et en réalité derrière lui pour le ministère du budget, de faire endosser aux universités les conséquences des manques de moyens financiers accordés par l’État. Ce qui a eu pour effet, la suppression de postes à l’université et dans la recherche (à Paris 1, cette année 36 % des postes vacants d’enseignants-chercheurs ont été gelés) le triplement du nombre d’agents contractuels, la diminution des moyens rapportés à chaque étudiant (pour rappel, les dépenses engagées par un étudiant en classe préparatoire sont en moyenne de 15 052 euros par an et de 10 576 euros pour un étudiant à l’université).

Cette nouvelle réforme de l’université vise à diminuer une nouvelle fois les moyens attribués à l’enseignement supérieur public. En effet, alors que le nombre de jeunes en âge d’entrer à l’université a augmenté, du fait de la croissance démographique de la fin des années 1990 et du début des années 2000 et de l’augmentation de la proportion de jeunes obtenant le baccalauréat, les différents gouvernements successifs ont fait le choix de ne pas augmenter les moyens alloués à notre secteur. Il est tout à fait possible de créer les places nécessaires pour accueillir ces candidats. Cela a été fait pour la rentrée 1969 avec, par exemple, la création de trois nouvelles universités expérimentales (Vincennes, Dauphine et Luminy). Le plan U 2000 lancé en 1991 constitue un autre exemple de création de places et d’établissements pour absorber la croissance démographique étudiante. Ce plan national a constitué une masse globale d’investissements de 40,3 milliards de francs sur neuf ans. Il a permis la construction de 3,5 millions de mètres carrés de nouveaux bâtiments universitaires et huit nouvelles universités en France dont quatre en Île-de-France (Évry, Cergy, Marne-la-Vallée, Versailles-Saint-Quentin). Parcoursup n’est pas qu’une solution technique aux dysfonctionnements d’APB, qui étaient dus à la saturation du système. Elle vise à faire endosser par les universités les choix budgétaires du gouvernement.

À Paris 1, on assiste à une diminution du nombre d’enseignants-chercheurs titulaires ainsi que du nombre de doctorants contractuels, à des sur services de plus en plus importants, à un accroissement du recours aux vacataires pour assurer des charges d’enseignements. Pour prendre l’exemple de l’histoire médiévale, il y avait en 2010-2011 41 titulaires et contractuels temps plein (7 rang A, 15 rang B, 1 PRAG, 4 ATER à temps complet et 14 moniteurs) pour 580 étudiants en L1. En 2016-2017, il n’y avait plus que 29,5 titulaires et contractuels temps plein (5 rang A, 15 rang B dont 3 IUF – soit l’équivalent de 13 rang B temps plein, 1 PRAG, 1,5 ATER et 9 moniteurs) pour 785 étudiants en L1. Les TD sont passés pour les mêmes années de 24 à 35 étudiants avec, par ailleurs, un recours de plus en plus systématique à des vacataires. Pour les fondamentales en histoire en L1 et L2, les TD assurés par des vacataires représentent l’équivalent de 897 heures (4 postes ½ d’ATER temps plein ou de maître de conférence) Ces choix budgétaires conduisent également à un manque chronique de personnel administratif, à la fermeture de la BIS le samedi (1er semestre 2016-2017) qui s’est transformée en ouverture sans possibilité de commander des ouvrages ce jour-là, à une augmentation des tarifs d’entrée à la BIS pour les chercheurs qui ne sont pas de nos universités. Pour les étudiants, cela se traduit par des TD de plus en plus chargés, un manque de place dans nos bibliothèques, un nombre de manuels de base trop peu importants rapportés au nombre d’étudiants.

Cette réforme ne sera pas la dernière de l’université. Nous savons que d’ici quelques semaines ou quelques mois au plus, sera sur la table une réforme qui aura pour conséquence l’accroissement de « l’autonomie » des universités, la suppression du diplôme de la licence remplacé par une addition de modules ; la fin de l’obligation des 1 500 heures d’enseignement pour une licence ; le développement des enseignements appelés non présentiels qui aura pour effet la forte diminution du nombre d’heures de cours magistraux; la modulation des frais d’inscription des étudiants en fonction du nombre de modules et en fonction du choix qu’ils feront entre des enseignements à distance, c’est-à-dire seuls derrière leur écran, et des enseignements réalisés en classe en face d’un enseignant ; l’augmentation des frais d’inscription (à titre d’exemple, les masters Vidal à Nice, dont les montants des frais d’inscription s’élèvent à 4 000 euros) ; la possible suppression de la distinction entre les CM et les TD ; la suppression des partiels de fin de semestre ; des modalités d’évaluations qui ne seraient plus définies nationalement. Les diplômes modulaires auront pour conséquence de détruire le cadre national des diplômes (niveau de qualification reconnu dans les conventions collectives et donnant droit à un salaire supérieur au SMIC) et d’augmenter les droits d’inscription (pour les DU, les droits d’inscription sont librement fixés par chaque université). Pour les personnels, BIATSS, la gestion des parcours individualisés et des blocs de compétences mènera à un surcroît de travail et de stress.

Cette réforme fait par ailleurs partie d’une attaque contre l’éducation nationale : la réforme du baccalauréat général, en détruisant les trois filières existantes, en supprimant le caractère national de ce diplôme, va lui-aussi accroître les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur des lycéens. Nous le savons depuis des années, et en particulier depuis la réforme de 2009, qui a modifié les concours de recrutement, ceux-ci sont en danger. Il est certain que le nombre de postes offerts au recrutement va continuer à diminuer2. Par ailleurs, les carrières d’enseignants n’attirent plus, à la fois du fait de la faiblesse des salaires, due à la non revalorisation du point d’indice et la non revalorisation des salaires des enseignants en particulier, et du fait de la dégradation des conditions de travail. Dans le même temps, on observe le recours croissant aux enseignants contractuels (l’an prochain l’académie de Versailles a prévu de recruter 600 professeurs contractuels). Cela nous concerne directement, d’abord peut-être car, pour beaucoup nous sommes certifiés ou agrégés, et que pour certains d’entre nous, nous avons exercé ou exercerons dans le secondaire ; enfin aussi, car la préparation à l’agrégation et au CAPES est l’une des formations importantes de notre UFR et que la bibliothèque Lavisse est la bibliothèque de l’agrégation, tout comme les oraux se préparent à l’institut de géographie et à la BIS.

Nous, ATER, doctorants contractuels ayant une mission d’enseignement, vacataires, sommes opposés aux réformes en cours qui entraîneront la destruction du métier que nous désirons exercer et pour lequel nous avons consacré plusieurs années de formation et nous nous déclarons opposés aux transformations des modalités d’entrée à l’université. Nous nous associons à ce mouvement, et appelons tous nos collègues, non-titulaires et titulaires, et tous les étudiants de notre université à entrer dans la lutte.

C’est pourquoi, nous soutenons les étudiants et les personnels mobilisés de Paris 1 et de l’ensemble des universités françaises.

Saisissons nous de cette occasion pour nous opposer à la mise en concurrence généralisée, et, ainsi défendre, ensemble, nos conditions de travail, nos conditions d’étude et notre avenir.

En conséquence de quoi, nous portons les revendications suivantes :

La loi ORE

Nous demandons l’abrogation de la loi ORE. En effet, l’offre de formation universitaire doit s’adapter au nombre de jeunes ayant obtenu le baccalauréat et désirant suivre une formation supérieure à l’université, et, autant qu’il est possible, dans les filières auxquelles ils aspirent.

Cela implique l’accroissement du nombre de places dans l’enseignement supérieur, et en particulier dans les IUT, afin que les bacheliers issus des filières professionnelles et technologiques puissent aussi y avoir accès, et, plus généralement, dans les filières dites en tension. La sélection ou bien le tirage au sort ne sont pas la solution à la croissance démographique.

Nous sommes favorables à la mise en place de mesures d’accompagnement des étudiants entrant à l’université et dont le niveau n’est pas suffisant pour suivre le cursus qu’ils ont choisi.

Immédiatement, nous demandons que les candidats puissent classer leurs vœux sur Parcoursup. Il est, en effet, tout à fait possible de demander aux 800 000 candidats de se connecter sur la plateforme et de hiérarchiser leurs 10 vœux, comme ils l’auraient fait avec Admission Post Bac en 2017. Une fois ces vœux hiérarchisés, il sera possible de déterminer les formations dans lesquelles il manque des places pour que l’ensemble des bacheliers puisse être affectés sur leur premier vœu universitaire. Cette hiérarchisation permettra d’une part de limiter les listes d’attente dans tous les secteurs (universitaire comme STS et CPGE), et d’autre part d’éviter que les 20 % de « meilleurs » bacheliers monopolisent les places en leur proposant « seulement » le vœu qu’ils auront classé premier.

Accroissement des moyens de l’université

Nous demandons l’augmentation du budget du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche afin d’améliorer les conditions matérielles d’étude des étudiants. Ce qui implique la construction de locaux supplémentaires, l’augmentation des dotations des bibliothèques, l’augmentation du nombre d’enseignants-chercheurs titulaires de la fonction publique, ainsi que du personnel administratif et technique, lui aussi recruté sous le statut de fonctionnaire d’État. L’embauche de personnels administratifs doit permettre de décharger les enseignants chercheurs autant que possible et améliorer les conditions de travail des agents administratifs confrontés à l’alourdissement de leur charge de travail et à l’intensification de celui-ci.

Nous sommes début mai, il reste le temps, comme en 1968, de déclencher un plan d’urgence pour la rentrée prochaine en créant les places (c’est-à-dire les postes et les mètres carrés) permettant d’affecter un maximum de bacheliers sur leur premier vœu.

Amélioration des conditions matérielles des salariés de l’université :

Nous demandons la revalorisation de nos rémunérations qui doit passer par l’augmentation du point d’indice pour tous les fonctionnaires, et aussi par une augmentation de la rémunération des jeunes chercheurs.

Outre l’augmentation du nombre de postes, qui doit passer par un dégel des postes de fonctionnaires, nous demandons la titularisation ou la CDIsation des personnels en CDD.

Nous nous opposons à toute remise en cause du statut des enseignants chercheurs dont nous savons que le ministère de l’ESR n’a pas renoncé à sa transformation, malgré sa défaite partielle de 2009.
Revendications spécifiques aux doctorants et aux enseignants non titulaires

Nous soutenons les revendications portées par le mouvement de mobilisation des doctorants, et en particulier la mensualisation du traitement des vacataires ; l’élargissement de l’exonération des frais d’inscription pour les doctorants de Paris 1 qui sont aussi vacataires de l’université et l’exonération pour les doctorants sur critères sociaux ; le remboursement des frais de transport pour les vacataires et sur critères sociaux pour les autres doctorants ; amélioration des conditions matérielles de travail ; augmentation des financements de thèse (contrats doctoraux et postes d’ATER pour que les doctorants soient rémunérés pour le travail.
Plan licence à venir

Nous exigeons le maintien de la licence comme examen national et qualifiant, d’un contenu disciplinaire en présentiel de 1500 heures minimum.

Nous demandons le respect des statuts des enseignants chercheurs : comptabilisation des heures sur la base du présentiel (avec maintien de la distinction CM/TD), modulation seulement sur demande de l’enseignant-chercheur (cette demande expresse restant le seul acquis obtenu lors des négociations de 2009 sur le statut des EC). »

L’assemblée générale des enseignants non titulaires de l’UFR d’histoire de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne réunie le 11 mai 2018.

1Il s’agit de compétences budgétaires et de gestion des ressources humaines (recrutement d’agents contractuels et gestion des primes, répartition des obligations de services et création de dispositifs d’intéressement)

2En 2017, 7 315 postes étaient ouverts pour l’ensemble des CAPES dont 680 en histoire-géographie et 1920 postes pour toutes les agrégations, dont 90 en histoire. En 2018, 5 833 postes étaient ouverts pour l’ensemble des CAPES, dont 540 en histoire ; pour l’agrégation les chiffres étaient de 1 555 dont 72 en histoire.

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