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Mais si, M. Blanquer, nous avons besoin de grève !

Dans sa course folle à la notoriété, et pour séduire l’électorat de l’ordre et de l’autorité – on se souvient de ses entretiens accordés à Valeurs actuelles, Causeur et au site SOS éducation – Jean-Michel Blanquer, au micro de RTL, vient une nouvelle fois distiller sa vision rétrograde de l’école… et de la société.

Questionné sur la mobilisation des personnels le 22 mars prochain, le ministre a affirmé :

« on n’a pas besoin de grève » et d’ajouter « Ça ne rend service à personne. Certaines nous ont mis en difficulté ».

Rappelons donc que, si nous aussi nous sommes « en marche », ce ne sera jamais au pas cadencé, au son du pipeau de quelques démagogues autoritaires. Nous serons en marche dans les rues, dans notre diversité pour exprimer notre colère et notre détermination à ne pas accepter une société « en marché », qui ne propose aux générations futures que de piétiner les faibles, les dominés et leurs aînés.

Oui, nous avons besoin de grève pour témoigner en acte de notre refus de cette société cadenassée qui ne profite qu’aux puissants et qui écrase de son mépris ceux et celles qui n’oublient pas de penser aux autres…

Oui, nous avons besoin de grève et des Ag pour nous rencontrer, échanger, débattre, recréer et vivre la démocratie dans nos établissements, nos quartiers, nos villes…

Oui, nous avons besoin de la grève pour redonner sens à notre travail, à la notion de collectif quand la hiérarchie nous impose son rythme et son calendrier sans laisser aux personnels le temps de se poser, de discuter, de se confronter, d’inventer et de créer…

Oui, nous avons besoin de grève dans nos écoles, parce qu’il est de notre responsabilité, en tant qu’éducateurs et éducatrices, de nous engager pour une société plus juste. Les futur.e.s citoyens et citoyennes que nous devons accompagner dans leur éducation ont besoin que nos paroles sur l’égalité, la solidarité, la dignité, ne soient pas que des mots. Nous voulons qu’ils et elles nous voient les faire vivre réellement, y compris au prix de quelques sacrifices… Nous ne voulons pas les « former » pour qu’ils prennent la place qu’on voudra bien leur accorder dans la société de demain mais les préparer à la transformer pour plus de justice et d’égalité. Ce combat pour une éducation libératrice des classes dominées est avant tout une histoire collective. C’est le nôtre mais pas seulement : c’est la société tout entière qui doit porter l’analyse critique des projets d’éducation et des enjeux de société qu’ils contiennent. Cette histoire collective, faite de luttes et de grèves – de 36 à 95 en passant par 68 – qui, contrairement à vos propos ont rendu mille fois plus service aux dominé.e.s que toutes les rodomontades ministérielles.

Oui, nous avons besoin de grève et de rêve, pour nous et nos collègues, mais aussi pour toutes les générations qui n’en peuvent plus d’être méprisées et saignées.

Oui, nous avons besoin de grève et de rêve… et nous reconnaissons bien volontiers qu’en effet « Certaines vous ont mis en difficulté » et tel était bien leur objectif !

Si votre modèle, Monsieur le ministre est la fameuse Maria Montessori dont les adeptes rêvent toujours de « dépolitiser » la pédagogie, au nom de « la science » et du « bon sens », évacuant le collectif, le social… nous, nous continuons à nous inscrire dans une vision de l’éducation radicalement opposée et c’est aussi elle que nous défendrons en nous mettant tous et toutes en grève parce que c’est le meilleur service à rendre à l’avenir !

Grégory Chambat

3 Comments

  1. Tamain

    Mais si, M. Blanquer, nous avons besoin de grève !
    Je comprends mal ce texte sur le besoin de grève et de rêve. De grève, je ne comprends pas; de rêve : oui, à condition de garder les pieds sur terre et d’analyser les origines des inégalités sociales. Un enfant a d’autant plus de chance de réussir qu’il est accompagné par sa famille pas à pas. Je crois qu’une bonne partie de nos échecs est dans des actions de gauche qui font le contraire de leur objectif. Par exemple, on veut réduire les inégalités en supprimant les devoirs à la maison. C’est l’inverse qui se produit car certains enfants accompagnés par leurs parents continueront d’apprendre à la maison. Les autres, non. Et on ne peut bien sûr pas interdire à des parents d’accompagner leurs enfants. Ce serait inefficace, idiot et injuste. La seule attitude est d’accompagner mieux les enfants qui ne le sont pas chez eux : classes moins chargées, devoirs accompagnés le soir, et surtout un état d’esprit : pour accompagner un rêve, il faut comprendre que l’effort est nécessaire. Cette obsession d’une école qui ne serait que ludique est un leurre désastreux. Oui au ludique, mais aussi oui à l’effort qui seul, peut permettre à chacun de développer au mieux son potentiel. Tout le reste (nouvelles pédagogies, utilisation massive des ordinateurs et tablettes qu’il ne faut utiliser qu’avec modération, …) n’est que poudre aux yeux.

  2. Thierry FLAMMANT

    Mais si, M. Blanquer, nous avons besoin de grève !
    Très beau texte Grégory ! Il a une allure de manifeste. Je souscris totalement à son contenu. Je ne vois aucun appel au ludique là-dedans. Il me semble que les propos de Tamain ne sont pas contradictoires avec ton texte. Ce n’est pas la politique du PDG de la France et de ses cerbères qui viendra en aide aux élèves pauvres ! Discutons, confrontons nos conceptions de l’école, de l’enseignement, du syndicalisme mais entre nous, au sein du mouvement ouvrier. Celui-ci a suffisamment contribué, par ses auteurs et ses militants depuis le XIXe siècle, a construire des principes, des écoles et des projets pour nous puissions nous dispenser d’aller voir ailleurs. Et pour ça, oui nous avons besoin de la grève !

  3. zamoussi

    Mais si, M. Blanquer, nous avons besoin de grève !
    Merci Grégory pour ce texte qui fait beaucoup de bien. Il m’en rappelle un autre, pour une autre grève … où j’avais décliné toutes les raisons libertaires et résolument politiques de faire grève : pour se réapproprier le temps quand sonne l’obsession de la rentabilité; pour se remettre debout, quand on s’endort sous la propagande doucereuse, pour retrouver les liens collectifs alors que nous éparpille le quotidien, pour sortir de la pensée binaire paresseuse (ludique contre effort, par ex …) et retrousser les manches de la réflexion.
    Restons exigeantE avec nous mêmes et pour les autres grâce à la grève !
    Je me réjouis déjà de tous les copains et copines que je croiserai demain et des longues discussions politiques et pédagogiques que nous échangerons sur le pavé !
    Bonne grève à toustes,
    Sophie

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