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La mouche et l’albatros

Qui n’a pas entendu parler des enfants intellectuellement précoces en cette rentrée 2013 ? A l’occasion de la sortie de plusieurs ouvrages, il en a été question dans les médias comme dans l’éducation nationale, comme en témoigne le site Eduscol, et le module de formation.

Comme d’habitude, beaucoup de clichés ont circulé… Le petit génie n’est pas forcément le premier de la classe, qui n’a pas de copains et dont les parents harcèlent les enseignants pour qu’il saute une classe. C’est peut être l’enfant rêveur qui regarde voler une mouche en imaginant un poème alors que l’enseignant attend la réponse à la question “6*7=?”.

Le problème, c’est que beaucoup de parents reconnaissent leurs enfants quand on décrit certaines caractéristiques des enfants précoces, comme par exemple : “il s’ennuie en classe”… Qui ne s’est jamais ennuyé en classe ? Nous, les parents… Pourquoi ? Sans doute parce qu’en primaire on nous demandait déjà de faire une règle de trois, de résoudre des problèmes de trains qui se croisent, etc, etc… Les instituteurs pouvaient nous emmener en forêt pour voir une amanite ou vérifier qu’il y avait bien 1km entre deux bornes. Que la rédaction consiste à raconter nos vacances ou qu’il faille faire le portrait d’un oiseau, on ne pouvait pas s’ennuyer, que l’on soit premier ou dernier de la classe…

Le problème, c’est que le RASED n’est plus ce qu’il était… Quand un parent dit à un enseignant que son enfant est sans doute précoce, la seule personne qui peut apporter une réponse claire est le ou la psychologue scolaire, en faisant passer des tests WISC. Or il faut près de deux heures pour cela, et autant pour analyser les 12 chiffres obtenus et le comportement de l’enfant pendant les tests. Si jamais une mouche est passée devant son nez alors qu’on testait sa mémoire immédiate, forcément, ça n’aide pas…

Le problème, c’est que ces enfants développent un complexe de l’Albatros… “Ses ailes de géant l’empêchent de marcher” disait Beaudelaire… On les juge en mettant des croix en face des compétences exigées pour chaque cycle, comme on juge la maladresse de l’albatros sur terre. Ceux qui veulent être bons élèves apprennent à marcher, quelque fois à force de rendez-vous chez le pédopsychiatre, l’orthophoniste ou le graphothérapeute. Beaucoup d’autres pourraient être les rois de l’azur si les laissaient s’exprimer, prendre des initiatives, explorer les sujets qui les passionnent au lieu de mettre des croix devant des compétences…

Dans le module de formation, on trouve des conseils qui semblent tirés de la pédagogie Freinet. Par exemple, page 13 :

  • encourager la créativité dans toutes les disciplines (recherche d’anagrammes pour mémoriser l’orthographe d’usage, pratique de dispositifs variés de calcul écrit d’opérations,…) ;
  • valoriser les travaux personnels et complémentaires de l’élève (les idées innovantes, la créativité, les compétences transversales de communication, d’autonomie) ;
  • privilégier particulièrement la pédagogie de projet pour permettre à l’élève de mettre en lien les apprentissages ;

Le 5 octobre, une conférence destinée aux professionnels et aux parents est organisée aux Ulis. Elle sera suivi d’un temps d’échange d’une heure et demi. Nul doute que l’on y parlera de la pédagogie de la mouche pour faire face au complexe de l’albatros…

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