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La Vie est plus grande que l’institution

Au fur et à mesure que les années passent, nous constatons que notre action éducative et sociale aussi précaires soit-elle, subsiste, se développe; au fur et à mesure que les années passent, nous voyons les institutions et les structures sociales se craqueler de partout , malgré les moyens considérables qu’elles continuent de monopoliser …

Progressivement nous constatons que ceux qui sont désignés comme « usagers », « publics »,, « bénéficiaires » décrochent des structures censées les parquer et les orienter; sous l’effet d’une précarisation constante de la société, le sens même des normes s’estompe et que les modèles classiques d’intégration et de participation sociale et urbaine doivent se réinventer…

Progressivement, nous mettons en évidence les effets du travail en Pédagogie sociale: effets souterrains dans un premier temps, mais qui impactent véritablement et durablement les parcours de vie,…

Progressivement, nous voyons se matérialiser sous nos yeux des intuitions qu’il y a quelques années encore on qualifierait « d’utopistes » comme le fait que nos pédagogues sociaux rroms et vivant en bidonvilles, encadrent et accompagnent des travailleurs sociaux en formation, que ce sont les enfants eux mêmes sur nos ateliers qui sont garants de la continuité de nos démarches et de notre identité collective, ..

Alors résonnent autrement en nous les positions incroyablement avant gardistes d’un Freinet qui pouvait déclarer en 1946:

« Lire, écrire, compter deviennent des acquisitions mineures. Non pas que les hommes n’aient plus à savoir lire, écrire, compter, mais l’École n’aura pas même commencé sa tâche si elle s’en est tenue à ces acquisitions : la vie aujourd’hui apprend bien plus vite et bien plus sûrement à maîtriser les disciplines et on se demandera un jour prochain pour quoi l’École est encore tellement hypnotisée par ces acquisitions, qui ne sont plus des acquisitions-clés. »

Et nous l’exprimons autrement aujourd’hui:

Ce sont les acquisitions sociales qui sont aujourd’hui essentielles. Elles sont les compétences urgentes et fondamentales dont notre époque a besoin et c’est ce dont il s’agit dans toutes les actions que nous mettons en oeuvre.

Simplement apprendre à se connaître, à se comprendre et à s’aimer assez pour vivre ensemble , dans les deux sens de la proposition « se« : entre tous, et en soi même.

Nous avons besoin d’une éducation à la politique , à la sensibilité et à l’actioncollective. Et c’est ce dont il s’agit tous les jours dans nos spectacles, sur nos ateliers, dans la simple performance d’être ensemble, un collectif aussi improbable, dans un environnement pourtant hostile.

« Vous êtes utopistes », entend t on assez souvent dire , en guise de critique lors des nombreux exposés dans les centres de formation, ou auprès des professionnels. « Utopistes », certainement pas, tellement le travail éducatif et social inconditionnel que nous prônons est le seul à pouvoir s’adapter aux formes nouvelles de la précarité et de la perte d’influence des institutions.

Ce ne sont certainement pas le réalisme et la réalité qui constituent des obstacles à notre travail et à notre entreprise. Au contraire, la réalité les commandent et les rendent indispensable.

Non ce qui s’oppose à la valorisation et à la reconnaissance de nos pratiques, c’est bien plutôt, l’idéologie, cette petite voix envahissante et colonisatrice qui nous fait dire à tout propos « que ce n’est pas possible », « qu’on n’a pas le droit », « qu’on ne peut pas », qu’il convient d’avoir peur, de se protéger , de se retirer, de s’enfermer, de renoncer à ses libertés….

C’est l’idéologie qui empêche les pratiques sociales de se réinventer et de faire éclore de nouveaux horizons. C’est l’idéologie qui use et désespère les professionnels; c’est l’idéologie qui rejette les publics et les groupes désignés comme « usagers » dans la marge et la désespérance.

C’est l’idéologie qui décourage toute action, d’entreprendre . C’est l’idéologie qui réclame et qui exige l’obéissance, la soumission , et une loyauté imposée vis à vis des institutions et de leur morale en faillite.

C’est l’idéologie qui affirme que rien d’autre n’est possible qu’elle même et qui pousse aux désespérances les plus banales (dépression sociale) ou les plus spectaculaires (martyr) .

En Pédagogie sociale, nous affirmons que les chose sont possibles puisque nous les faisons déjà; nous démontrons que la seule position réaliste consiste à remettre en question tout ce qui nous paraissait tellement évident que nous ne savons plus rien faire quand ça ne marche pas: l’éducation punitive par la répression, le culte de la morale des repères et des cadres à tenir ou reconstruire coûte que coûte, la contractualisation qui ne passe pas par la confiance préalable, l’idéologie du projet qui inhibe toute passion, etc…

A toutes ses morales tristes nous répliquons par « l’invariant N°30 », de Freinet:

« Il y a un invariant aussi qui justifie tous nos tâtonnements et authentifie notre action: c’est l’optimiste espoir en la vie. »

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Graines d’orties

Association Intermèdes-Robinson

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