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L’exemple d’Harvard (Nord-Est des Etats-Unis, syndicalisme de lutte et problèmes sociaux)

Nous vous proposons un extrait du long entretien réalisé par Fabien Delmotte dans un article qui fait le point sur la situation du syndicalisme américain, son actualité et son histoire, et propose par ailleurs un aperçu des activités des syndicalistes révolutionnaires des Industrial Workers of the World (IWW).

L’extrait sur Boston et Harvard

Jason, peux-tu décrire la situation sociale à Boston pour les gens qui ne la connaitraient pas bien, ainsi que les activités militantes là-bas ?

Jason Freedman : Boston est une ville majoritairement blanche, extrêmement dominée par les institutions éducatives et de santé ; nous avons beaucoup d’hôpitaux ici. Il y a Harvard, le MIT, mais aussi des écoles très ouvrières comme Wentworth ou UMass Boston. Je pense que les problèmes sociaux concernent ici principalement le racisme, la police et la gentrification. Il y a un faible taux de criminalité. Les « business unions » sont assez forts à Boston. C’est une ville considérée comme très libérale [au sens américain du terme]. On tend à y voter “Démocrate” aux élections et les « business unions » tendent à soutenir le Parti Démocrate.

Il y a eu une résurgence du militantisme syndical à la base, auquel les IWW participent ainsi que de petits éléments des AFL-CIO, de Unite-Here. Quand Occupy est arrivé, des syndicats l’ont soutenu, comme ceux des enseignants et des infirmières.

Les IWW sont impliqués au niveau régional dans plusieurs campagnes, dans l’agroalimentaire, l’éducation, en particulier à l’université d’Harvard.

Pouvez-vous préciser la nature de vos activités syndicales à l’université d’Harvard ?

Geoffrey C. : Harvard est un des plus gros employeurs du Massachusetts, donc il y a des milliers et des milliers de gens qui travaillent ici. La discrimination est un gros problème à Harvard. Depuis que je suis représentant syndical, j’ai vu plein d’exemples de discrimination raciale, de genre, sur la base d’un handicap ou d’une origine nationale… Dans d’autres endroits où j’ai travaillé, les gens se souciaient vraiment de ces problèmes, mais ici à Harvard il semble que la direction n’en ait vraiment rien à faire.

Donc, nous sommes impliqués dans un travail anti-discrimination. Nous avons en particulier mené des actions sur le campus pour nous plaindre du racisme et d’autres formes de discrimination. Par exemple, nous tenons des piquets pour attirer l’attention sur les problèmes rencontrés par les travailleurs de la restauration et aussi de la sécurité, car certains d’entre eux ont en fait rejoint les IWW. Par exemple, ils vont essayer de se débarrasser de quelqu’un qui revient d’un congé maladie, en lui parlant tout le temps de son mauvais travail…et ils veulent licencier une autre personne dont le patron a dit que son anglais n’était pas assez bon alors qu’elle fait ce travail depuis 9 ou 10 ans…

Je pense que l’image du syndicat est celle d’un syndicat de combat, organisé démocratiquement. Plus généralement, le syndicat apparait de plus en plus comme un syndicat de lutte de classe dans le pays et cela explique aussi pourquoi des gens nous rejoignent. Les gens que nous touchons sont des tas et des tas d’employés de bureau, du personnel d’entretien, de la restauration et des étudiants.

Geneviève L. : Nous tenons régulièrement des piquets à Harvard. Les journaux de l’école en parlent quand nous faisons cela. Nous collaborons aussi avec les étudiants, ils peuvent évidemment faire des choses que nous ne pouvons pas. Ils ont occupé ici des bâtiments de multiple fois. Il y a aussi divers sit-ins… Parfois, nous organisons des réunions publiques. A propos de la discrimination, de problèmes de contrat…

Geoffrey C. : Récemment, il y a eu énormément de licenciements. Dans tous les syndicats, il y a eu des vagues de licenciement en 2004, 2009. Nous avons perdu une partie de nos adhérents à cause de cela, ou de mises à la retraite précoces, etc. La direction du principal syndicat n’a rien fait à ce sujet, des centaines d’emploi ont disparu et ils n’ont rien fait… Alors, on a fait notre propre campagne et créé nos propres actions, avec des étudiants comme Geneviève l’a mentionné.

Geneviève L. : Parfois, il n’y a qu’une poignée de travailleurs à nos piquets, et parfois beaucoup de camarades des IWW et de la gauche locale viennent et il y a des dizaines et des dizaines de personnes… Il y a eu une campane récemment sur le salaire de subsistance et il y avait plusieurs centaines de personnes tous les jours ou semaines.

Harvard a fait des choses terribles concernant la lutte de classe dans l’histoire. Par exemple, la grève « Bread and Roses », menée principalement par des femmes en 1912 (avec les IWW) dans des villes du nord de Boston et du Massachusetts. C’étaient des jeunes femmes dans le textile, des immigrées du monde entier. Elles étaient en grève et l’Université d’Harvard a donné des crédits de cours aux étudiants et les a exhorté à défendre leur classe en allant servir de briseur de grève. Et, bien sûr, les étudiants, à cette époque, étaient tous des hommes et les grévistes des femmes. Et ils étaient envoyés par l’Université pour briser la grève. Mais la grève a finalement été une des plus importantes et réussies de l’histoire.

Harvard a fait beaucoup d’autres choses horribles. Il y a un film à propos de la manière dont Harvard et ses départements, sur le plan institutionnel, sont liés à l’impérialisme. Certains d’entre eux ont été fondés dans les années 60 et sont à peine séparés de la CIA. Donc il y a des programmes d’étude sur des zones internationales qui ont toujours opéré comme des conférences informelles au service de l’oppression militaire…

Le début … et la suite ce cet entretien “Nord-Est des États-Unis : syndicalisme de lutte et problèmes sociaux” sur le site Autre futur : http://www.autrefutur.net/Nord-Est-des-Etats-Unis-syndicalisme-de-lutte-et-problemes-sociaux

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