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L’école de Blanquer : contrôle, inégalités, sélection et soumission au programme.

Les travailleuses et travailleurs de l’éducation connaissent bien leur ministre. Tous les médias parlent de lui. Sa cote de popularité ferait rougir de jalousie un dirigeant nord-coréen. Les louanges viennent de toutes parts : décideurs économiques, classe politique, éditorialistes de toutes les droites, sondeurs…
Seul.e.s les enseignant-e-s semblent ne pas partager cet enthousiasme. Les critiques commencent à gonfler chez les profs mais aussi, et c’est plus rare, dans la hiérarchie de l’éducation nationale (inspecteurs, proviseurs…), chez les chercheurs et les scientifiques.
Tout comme ces rabat-joie, les syndicats de la FTE réfutent la validité scientifique des méthodes préconisées par le ministère au travers de ses circulaires. Sous couvert d’une approche scientifique grossièrement instrumentalisée se déploie une authentique offensive idéologique réactionnaire contre l’égalité à l’école, les conditions de travail et les pédagogies émancipatrices.
Les travailleurs et les travailleuses de l’éducation de la CNT réaffirment que l’éducation est un processus social et collectif qui doit permettre aux élèves et aux enseignant.e.s de s’approprier consciemment des connaissances, de trouver du sens dans le travail proposé et d’expérimenter des relations de coopérations.
Dans ce cadre, la liberté pédagogique est une condition de l’efficacité professionnelle des enseignant.e.s. C’est cette liberté qui leur permet de s’adapter à la grande diversité des élèves dont ils ont la charge en se basant sur leur culture professionnelle. Les neurosciences, si elles peuvent offrir un éclairage sur certains processus cognitifs, ne sauraient constituer un point de référence pour attribuer un brevet d’efficacité à quelques méthodes sélectionnées par des experts choisis par le ministre.
Cette approche individualiste, trop facilement oublieuse des conditions sociales, culturelles et temporelles dans lesquelles évoluent les enfants, participe d’un renforcement de l’école du tri social basé sur le fichage, la sélection, le contrôle, le management et la précarisation.

De la maternelle à l’université, la précarisation des personnels, c’est le recours massif aux contractuel-le-s en lieu et place des fonctionnaires, le remplacement des contrats aidés par des services civiques sans droit ni salaire, l’usage exponentiel de contrats précaires pour couvrir des missions essentielles, sans perspectives de titularisation…

Cette politique insécurise les personnels confrontés à des conditions de travail de plus en plus difficiles. C’est qu’à l’école, comme ailleurs, le crétinisme et la violence managériales ont tout envahi.
L’approche par compétences segmente les savoirs en micro-tâches dénuées de sens. La religion de l’évaluation permanente et du pilotage par les chiffres anéantissent tout réel travail vivant et stimulant pour les élèves et renforcent les hiérarchies et les possibilités de pressions sur les travailleur-euse-s. Les enseignant-e-s passent un temps infini en réunions imposées par l’institution sans utilité concrète pour l’organisation de l’école, de la classe ou de l’aide aux élèves. Noyé-e-s par une surcharge de travail, les professeurs acceptent forcément plus facilement d’appliquer les prescriptions et les méthodes toutes faites « proposées » par le ministère sous la forme de procédures standardisées. Les outils les plus dangereux sont utilisés sans résistance, à l’instar du LSUN (livret scolaire unique numérique) qui fiche les élèves, leurs résultats et leurs comportements. Ce livret numérique permettra, sans l’ombre d’un doute, de sélectionner et de trier très efficacement les élèves en fonction de leur « employabilité » et d’évaluer les « performances » des enseignant-e-s. Tout est prêt pour l’avènement de la « paie au mérite », cette prime à la soumission qui se « discute » en ce moment entre « partenaires sociaux » au ministère.

La sélection, si elle ne dit pas son nom, est de retour du collège à l’université et elle est décomplexée. Mise en compétition des collèges en fonction de leur « attractivité », réforme du bac et du lycée qui poussent à l’orientation précoce et définitive et, bien sûr, la scandaleuse loi ORE et son redoutable ParcourSup qui consacrent le confort d’orientation pour les privilégié-e-s et la galère pour les autres, et transforment les individus en simple rouage d’une machine en les dépossédant de leur choix et de leur volonté pour les placer là où ils et elles seront considéré-e-s à leur place.

Tous les ingrédients sont donc réunis pour transformer encore davantage l’école en une machine à former de la main d’œuvre compatible avec les besoins du patronat sans encombrer les universités avec les enfants du peuple.

La mort programmée de l’enseignement professionnel au profit d’une formation patronale assumée achève de compléter ce sinistre tableau, cauchemar d’une école vendue aux appétits et aux logiques capitalistes.

Les travailleuses et travailleurs de l’éducation de la CNT s’engageront, demain comme hier, sur le plan syndical, pédagogique et idéologique dans le combat pour la défense d’un service public d’enseignement égalitaire, émancipateur et coopératif.

CNT-FTE, 26 mai 2018

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