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Evaluation à la maternelle. Des contradictions et des aberrations

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Évaluation à la maternelle des contradictions et des aberrations

A la suite des changements de programmes de la maternelle au collège, le ministère a engagé une réforme de l’évaluation des élèves qui répond, selon lui, à une nécessité de simplifier les outils de suivi des élèves en les uniformisant sur l’ensemble du territoire pour les rendre plus lisibles et accessibles aux familles. Elle revêt différentes formes selon les cycles d’apprentissage. Un carnet de suivi des progrès A l’école maternelle pour le cycle 1, est préconisé un carnet de suivi des élèves qui sert à la fois à évaluer les élèves, à rendre compte de leurs progrès, et à communiquer avec les familles. Il s’inscrit, avec les nouveaux programmes, dans le cadre d’une revalorisation de la maternelle afin de lui restituer sa particularité tout en prenant en compte la spécificité de la petite enfance dans le respect du développement cognitif, affectif et moteur de l’enfant. Le but étant de mettre en œuvre des modalités d’apprentissages adaptées et de porter un regard individuel sur le développement et les progrès de chaque enfant. Voilà pour les déclarations d’intentions auxquelles nous souscrivons… Si le carnet de suivi s’inscrit dans le cadre d’une évaluation formative positive et encourageante pour les élèves, il n’en reste pas moins un outil d’évaluation quasi permanente des élèves dont la mise en œuvre se révèle une véritable usine à gaz, induisant une uniformisation des pratiques pédagogiques au sein des écoles. Une synthèse des acquis En complément de ces carnets de progrès, est instituée en fin de cycle 1, une synthèse des acquis scolaires. Cette dernière a pour objet de « faciliter la continuité du parcours scolaire des élèves lors du passage à l’école élémentaire » en mentionnant « pour chacun ce qu’il sait faire, ses points forts et, le cas échéant, les besoins à prendre en compte pour l’aider au mieux dans la suite de son parcours scolaire ». Cette synthèse, obligatoire, est calquée sur les 5 domaines du programme, eux-mêmes décomposés en un maximum de 5 items. Chaque item est évalué selon 3 niveaux : « ne réussit pas encore », « est en voie de réussite », « réussit souvent ». Si le nombre d’items est volontairement très réduit, cette synthèse qui n’a aucune visée pédagogique ne s’inscrit dans aucune continuité avec la mesure des progrès des élèves voulue par le carnet de progrès. A force de synthèse, elle rend la progression des élèves totalement invisible. On est une fois de plus dans un mélange des genres cher à l’institution : d’un côté, le discours officiel prône une évaluation « bienveillante » avec des visées formatives, et de l’autre, on délivre dès la fin de maternelle ce qui n’est ni plus ni moins qu’un certificat de fin de cycle. On peut se demander s’il ne s’agit pas de justifier auprès des familles de l’importance de l’école maternelle avec des apprentissages quantifiables et mesurables comme ceux du reste de la scolarité ? Comment les enseignant-e-s de cycle 2 vont ils et elles pouvoir utiliser ces synthèses avec des informations aussi floues ? Cette synthèse n’a pour objet que de donner l’impression d’un suivi individuel et d’un dépistage des élèves en difficultés à l’entrée en CP. Il s’agit de faire croire que l’institution s’occupe individuellement des élèves alors qu’elle ne met aucun moyen pour le faire et que dans la majorité des académies, les réseaux d’aide n’interviennent plus en maternelle faute de personnels en nombre suffisants. Les enseignant-e-s n’ont jamais rempli autant de papier pour justifier de demandes d’aide pour leurs élèves sans en avoir aussi peu les moyens. Les tableaux et autres synthèses à remplir se substituent aux dispositifs réels de prévention et d’aide. Pour SUD éducation, cette synthèse dépasse largement le cadre d’une nécessité de simplification et d’uniformisation des outils d’évaluation. Les items totalement flous ne permettent en rien d’aider les élèves à progresser. Au contraire, ceci abolit toutes tentatives de leur donner du sens. Pratiques pédagogiques coopératives contre injonctions institutionnelles normatives Nous considérons que la question de l’évaluation des élèves ne peut pas relever d’injonctions institutionnelles normatives. Les évaluations et leurs rendus doivent être des outils construits par les enseignant-e-s dans le cadre de leurs pratiques pédagogiques pour faire progresser les élèves à leurs rythmes, en s’appuyant sur les acquis et les recherches des pédagogies coopératives. SUD éducation revendique ► une évaluation formative plutôt que sommative, ► une évaluation dans un cadre pédagogique ne donnant pas lieu à un quelconque « fichage » de l’élève, ► un temps de réflexion collective pour traiter de l’évaluation dans nos obligations de service. À l’opposé des orientations proposées par la refondation de l’école qui servent toujours les mêmes intérêts, SUD éducation revendique une école égalitaire et émancipatrice qui s’inscrit dans un projet de société solidaire, démocratique, débarrassée des inégalités. C’est pourquoi SUD éducation agit pour que se construise un rapport de force afin d’imposer une autre école, dans une autre société.
Fédération SUD Education

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2 Comments

  1. Constance Boughönn

    Evaluation à la maternelle. Des contradictions et des aberrations
    “Les items totalement flous ne permettent en rien d’aider les élèves à progresser. ” ecris-tu , Ce ne sont pas les items qui permettent aux élèves d’avancer. Ce sont des enseignant.e.s, justes, équitables et bienveillants

  2. Anonyme

    Evaluation à la maternelle. Des contradictions et des aberrations
    des contradictions et des aberrations mais une sacré avancée.

    Enfin, pour des enseignants comme moi (je veux dire des vieux) qui ont depuis, Chevènement ou presque, subi des textes officiels sur la maternelle de plus en plus stupides (avec la palme pour les programmes de 2008 et le comique Bentolila qui traine en ce moment avec Juppé et les francs maçons, comme quoi on en n’est pas débarrassé!), ces derniers textes sont d’indéniables avancées.

    Penser que les textes n’influencent pas les pratiques est faux, notamment en ce qui concerne l’évaluation.

    Il n’y pas si longtemps presque toutes les inspections départementales maternelles ou les circonscriptions pondaient des évaluations de fin de grande section non obligatoires mais fortement conseillées dont le contenu était critiquable, le temps de passation chronophage et qui donnaient une image du métier telle, qu’il est difficile de voir aujourd’hui un(e) enseignant(e) de maternelle se promener sans une grille avec des cases à cocher.

    J’ai refusé de les passer mais cela n’a jamais fait partie me semble-t-il des consignes syndicales fussent-elles de SUD.
    Il aura fallu accepter, une fois encore, d’endosser le rôle de râleur voire de fainéant.

    Aujourd’hui, comme par enchantement, ces évaluations ont disparu et, plus drôle encore, ce sont les mêmes, conseiller(e)s pédagogiques et inspectrices (eurs) (les contre-maitres quoi!) qui se font les promoteurs de l’évaluation bienveillante.

    Il est évident qu’il existe une contradiction entre l’évaluation bienveillante et la très normative synthèse des acquis mais penser que grâce à l’école maternelle le gouvernement allait abandonner l’idée très européenne du socle commun: nous n’y sommes pas encore, dommage!

    En tout cas, je trouve que les nouveaux textes qui encadrent l’école maternelle sont progressistes. (en regard des 20 ans que nous avons traversé… C’était hier: une école maternelle sans programme et sans évaluation).

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