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Dublin 3 ?

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A propos des réfugiés, on parle de “dublinés”, de “Dublin 3”. Le texte qui suit donne les explications qui permettent de mieux comprendre.

En finir avec le règlement Dublin ‬pour un vrai droit d’asile en Europe
Appel des collectifs,‭ ‬associations,‭ ‬citoyens solidaires à sortir de la politique du ni-ni‭ ‬:‭ ‬ni accueil des réfugiés,‭ ‬ni rejet du droit d’asile
En mai‭ ‬2017‭ ‬le nouveau Président de la République aura la responsabilité de définir les axes de la politique d’accueil de la France à l’égard des réfugiés.‭
Aujourd’hui, malgré l’affichage d’une politique d’accueil (augmentation des places en Centres d’accueil pour demandeurs d’asile – CADA -, création de places d’hébergement pour les exilés du bidonville de Calais, centre humanitaire de Paris), la France applique depuis de nombreux mois une politique d’expulsion massive de ses demandeurs d’asile‭ ‬grâce aux rouages du règlement Dublin III. A propos des réfugiés, on parle de “dublinés”, de “Dublin 3”. Le texte qui suit donne les explications qui permettent de mieux comprendre.
Les collectifs,‭ ‬associations et citoyens solidaires,‭ ‬atterrés de ce double discours et dénonçant avec force le règlement Dublin,‭ ‬demandent aux candidats à la Présidence de la République de sortir du silence.
Le règlement Dublin III, c’est quoi ?
C’est la règle européenne prévoyant qu’un réfugié potentiel doit demander l’asile dans le premier pays européen où il pose le pied. La preuve de son passage dans un pays européen est généralement constituée par l’enregistrement de ses empreintes digitales dans le fichier Eurodac. Cette prise d’empreinte est très souvent obtenue par la contrainte ou la force.
A lui seul, ce signalement Eurodac justifie l’application aux demandeurs d’asile d’une procédure dite « dublin », au terme de laquelle ils peuvent être renvoyés dans le premier pays européen traversé. Dans la logique de cette procédure, les personnes sont renvoyées sans avoir jamais l’occasion d’exposer les raisons de leur venue en France.
Actuellement, cette procédure permet de faire obstruction à 70 à 90 % des demandes d’asile, et justifie une politique d’expulsion (dites « transferts ») massive.
En France : « Dublinez-moi ces réfugiés que je ne saurais voir ! »
Le règlement Dublin III est un prétexte au non-accueil.
L’application de la procédure Dublin n’est pas obligatoire, les Etats sont libres d’examiner les demandes d’asile de toute personne. C’est le choix inverse qui a été fait par la France : dans une lettre d’instruction de juillet 2016, le Ministre de l’Intérieur a explicitement ordonné aux préfectures d’appliquer systématiquement la procédure Dublin aux personnes signalées dans Eurodac et d’augmenter le nombre de renvois effectifs. L’ordre a été rigoureusement respecté par les préfets, puisque les renvois Dublin ont augmenté de 150 % entre 2015 et 2016.
Tous réfugiés, tous dublinés, tous renvoyés.
Le règlement Dublin III précarise les populations primo-arrivantes.
Les personnes dites « dublinées », même quand elles ne sont pas assignées à résidence, font l’objet tout au long de la procédure de diverses convocations. Si elles ne s’y présentent pas, elles sont dites « en fuite » : elles perdent le bénéfice de leurs droits de demandeur d’asile, à savoir une allocation de subsistance et un hébergement, et doivent attendre 18 mois pour reformuler une demande d’asile en France. Elles vivent également sous la crainte perpétuelle d’être arrêtées, placées en centre de rétention et renvoyées. Cette situation socio-économique, induite par les pratiques préfectorales déloyales encouragées par le gouvernement, est un terreau idéal pour les réseaux d’exploitation, de travail au noir, de mendicité.
Si la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde, elle ne se prive pas d’en créer.
En Europe, l’organisation du non-accueil
Le règlement Dublin III fait peser toute la pression migratoire sur les pays du Sud et de l’Est de l’Europe.
Les demandeurs d’asile arrivent dans les pays qui ont les capacités d’accueil les plus modestes : ceux du Sud et de l’Est. De cette manière, les pays de l’Ouest s’exonèrent de toutes leurs responsabilités, et laissent quelques pays se débattre avec ce que l’UE appelle « la charge » migratoire. Quitte à exposer les réfugiés à de graves atteintes au droit d’asile, à l’enfermement systématique ici, des violences ailleurs.
Abandonnés dans l’accueil des réfugiés, ces quelques États frontaliers fournissent alors un bon argument pour dire « On ne peut pas accueillir les réfugiés ! Regardez comme cela se passe mal ! »
Le règlement Dublin III permet le renvoi vers des pays où ne sont respectés ni le droit d’asile ni les autres droits humains.
Les dublinés ne refusent pas leur transfert vers d’autres pays par caprice, mais bien parce qu’ils craignent à raison que leurs droits n’y soient pas respectés. Plusieurs pays européens sont en effet pointés du doigt tant par les ONG que par des institutions :
la Bulgarie :
Atteintes aux droits de l’Homme : L’UNHCR ainsi qu’Amnesty International dénoncent depuis des mois violences, incarcérations arbitraires, traitements dégradants à l’égard des personnes exilées
Accès à l’asile : Il est difficile, voire impossible dans certains cas d’obtenir l’asile en Bulgarie. La loi prévoit notamment la possibilité de rejeter une demande d’asile sans même convoquer le demandeur à un entretien. * *.
la Hongrie :
Atteintes aux droits de l’Homme : Le pays est également dans le viseur de l’UNCHR et d’Amnesty International pour traitements dégradants et violences à l’égard des exilés. Tout récemment, la Hongrie a décidé d’enfermer systématiquement tous les migrants, qu’ils soient ou non réfugiés potentiels, à leur arrivée.
Accès à l’asile :L’UNHCR a dénoncé des cas de refoulement des demandeurs d’asile. La loi hongroise est également extrêmement restrictive quant aux conditions d’accès à l’asile. * *.
L’Italie * :
Atteintes aux droits de l’Homme :Amnesty a fait état de traitements dégradants voire de torture à l’égard des réfugiés.
Accès à l’asile :L’Italie étant l’un des principaux points d’entrée en Europe, son système d’asile est surchargé et il est très difficile d’y obtenir une protection.
La Grèce * :
Accès à l’asile : Depuis 2011 et des arrêts de la CEDH, les États d’Europe ne pouvaient pas renvoyer des demandeurs d’asile en Grèce en application du règlement Dublin, faute d’un accueil digne. Il était de fait impossible d’y déposer une demande d’asile. Pourtant, par suite de l’accord passé avec la Turquie et de quelques évolutions de la réglementation nationale, la Commission a déclaré que les renvois vers ce pays redevenaient possibles.
Exiger un traitement digne n’est pas un caprice, c’est un droit.
Le règlement Dublin III porte les germes du déni d’accès au droit.
Il existe d’énormes inégalités dans le traitement des demandes d’asile d’un Etat européen à l’autre. Selon sa nationalité, et selon les périodes, les chances pour un demandeur d’asile d’être reconnu réfugié varient selon les pays de 80 % à 50 % voire 3 % ! Le règlement Dublin empêche de reformuler une demande d’asile ailleurs : ainsi, non seulement il empêche le choix du pays d’arrivée, mais il ne laisse aucune seconde chance.
Face tu perds, pile tu perds.
Le règlement Dublin III permet la sous-traitance des renvois massifs vers les pays d’origine.
Les renvois Dublin permettent aux États du Nord et de l’Ouest de l’Europe de s’exonérer complètement de leurs responsabilités vis-à-vis des demandeurs d’asile. La notion de « pays sûr » n’est pas homogène en Europe : s’il n’est par exemple pas dans les pratiques en France de renvoyer des personnes en Afghanistan, ça n’est pas le cas pour la Norvège, la Belgique, la Croatie ou l’Allemagne. Lorsque la France transfère ses « dublinés » vers ces pays, elle ferme les yeux sur leur avenir. Il n’est d’ailleurs pas rare que les Etats européens se renvoient plusieurs fois des personnes jusqu’à ce que l’un d’eux décide d’une expulsion, y compris vers un pays en guerre. Ces renvois ne sont pas anecdotiques :
Renvois vers le Soudan par l’Italie *,
Accélération des expulsions vers l’Afghanistan prévues par l’accord Union européenne / Afghanistan * *.
Bonne conscience d’un côté, renvoi vers la guerre de l’autre, la boucle est bouclée.
Pour une politique conforme à nos valeurs et nos engagements.
Lorsque des réfugiés arrivent sur son territoire, la France effectue un tri absurde et injustifié entre les « bons réfugiés », et les « dublinables ». Pour des raisons géographiques évidentes, mais aussi du fait des sanctions infligées aux entreprises de transport, il est devenu quasiment impossible de venir demander l’asile en France sans passer par un autre pays européen. Echapper au règlement Dublin III relève du hasard et de la chance.
Ce tri permet à la France d’afficher une politique d’accueil ne concernant qu’une minorité des demandeurs d’asile, tout en pratiquant une politique brutale de renvoi et d’obstruction au droit d’asile.
Une autre voie est pourtant possible, plus conforme aux valeurs de notre pays dont le futur Président de la République sera le garant.
L’article 17 du Règlement de Dublin III précise :
(17) Il importe que tout État membre puisse déroger aux critères de responsabilité, notamment  pour des motifs humanitaires et de compassion, afin de permettre le rapprochement de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent et examiner une demande de protection internationale introduite sur son territoire ou sur le territoire d’un autre État membre, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères obligatoires fixés dans le présent règlement.
Cet article a été repris dans la Constitution française, dont l’article 53-1 précise :
[…] Toutefois, même si la demande n’entre pas dans leur compétence en vertu de ces accords, les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif.
Développer une politique effective d’asile et d’accueil est donc une question de choix politique.
Les collectifs réunis demandent aux candidats à la Présidence de la République :
de réaffirmer clairement leur attachement au droit d’asile, droit fondamental cher à notre République, reconnu par notre Constitution et notre adhésion à la Convention de Genève de 1951.

Les collectifs réunis demandent également aux candidats de s’engager à une politique d’asile effective :
en cessant d’appliquer le règlement Dublin
en faisant preuve de transparence et de loyauté dans les procédures afin de ne pas mettre artificielement en fuite les personnes
en défendant l’abrogation du règlement Dublin au sein des institutions européennes afin de revenir à une véritable application de la Convention de Genève de 1951.


Les organisations signataires :
Paris d’Exil
NPA
Ensemble
MRAP
EELV
RESF
United Migrants
La Cimade Ile-de-France
GISTI
LDH Paris
Collectif Austerlitz
Association KÂLÎ
PCF Paris 19e
Les réponses des candidats seront publiées ici.
Contact : stopdublin@gmail.com

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