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Tribune : plus de maîtres.esses que de classes !

Enseignants œuvrant à des niveaux divers dans le système scolaire, tous attachés à la réussite des élèves, nous nous sommes retrouvés suite aux annonces médiatiques concernant le devenir du dispositif “Plus de maîtres que de classes”. Engagés résolument pour l’accès aux apprentissages des élèves les plus éloignés des normes scolaires, nous souhaitons poser clairement un état des lieux de ce que permet le dispositif PDMQDC actuellement.

 
Pour signer la pétition qui accompagne cette tribune : cliquer sur le lien

Une nouvelle valse des dispositifs :
 
Après quatre années d’expérimentation du “Plus de maîtres que de classes” (PDMQDC) et avant toute évaluation de ce dispositif, E. Macron propose, dès la rentrée 2017, de substituer à ce dispositif des CP à effectif réduit, de 12 élèves dans les REP et REP+.
 
Souplesse des modalités de travail

Implanté depuis 2013 en REP mais aussi dans certaines écoles hors REP présentant des besoins particuliers, le dispositif « plus de maîtres que de classes » permet un taux d’encadrement plus fort sur les 24 heures de temps scolaire hebdomadaire et une plus grande souplesse d’organisation au sein de l’école. Un maître « en plus » facilite en effet la variation des formes de travail. Il peut ainsi intervenir au sein de la classe aux côtés de l’enseignant, mais aussi encadrer une demi-classe, en parallèle de l’enseignant, ou agir auprès d’un petit nombre d’élèves repérés. Son intervention, en priorité en Cycle 2, peut néanmoins s’élargir parfois aux cycles 1 ou 3 quand l’équipe le juge nécessaire, tout en étant attentif à éviter  le « saupoudrage » des actions du maitre supplémentaire.
Chacune de ces modalités de travail est guidée par l’analyse des besoins des élèves ou des classes et engage les équipes à hiérarchiser des priorités, dans les apprentissages fondamentaux.
 
 
Effets sur les élèves

L’évaluation  nationale du dispositif PDMQDC est en cours. Cette évaluation n’est pas aisée, les effets du dispositif sur les progrès des élèves sont en effet difficiles à isoler d’autres facteurs (les effets maîtres, les effets classes). Pour autant, les équipes ont l’impression que des progrès sont perceptibles: moins d’élèves non lecteurs en fin de CP, des élèves qui produisent plus volontiers des écrits. Ils disent aussi voir des progrès sur leur engagement et leur motivation.
Les effets bénéfiques du dispositif plus de maîtres que de classes tiennent donc selon les équipes au fait que travailler à deux (maître de classe et maître supplémentaire) permet d’associer deux styles d’enseignement complémentaires pour atteindre le plus grand nombre d’élèves au sein d’une même classe, et donc moduler les pratiques des professeurs. De plus, un élève en manque de confiance peut se tourner vers un deuxième référent adulte. Enfin, le dispositif offre une aide régulière et soutenue sur l’ensemble de l’année scolaire, mais modulée en cours d’année et axée sur le parcours des élèves sur l’ensemble du cycle 2. 
 
 Envisager des CP à 12 au détriment du PQMQDC :  

– C’est une opération simple (voire simpliste),  qui présente le risque de ne pas agir sur une modulation des pratiques, mais seulement de rendre, par la réduction du nombre d ‘élèves, la classe plus supportable ; 

– Même si le climat de classe a effectivement des effets favorables sur les apprentissages des élèves, un groupe classe réduit de 12 élèves pourrait reléguer à un second plan la vigilance sur l’hétérogénéité et laisser croire aux enseignants que le petit nombre ne nécessiterait pas de différenciation effective, que tout pourrait s’effectuer à 12.
 
Effets sur les enseignants

Le dispositif plus de maîtres que de classes a montré l’efficacité du co-enseignement sur la dynamique entre maître de classe -maître supplémentaire, mais plus largement sur l’équipe d’école.  Co-enseigner, c’est nécessairement anticiper la séance à au moins deux, la co-construire, la co-évaluer. C’est alors obligatoirement parler de ce que l’on fait, de comment on le fait.  

L’expérience particulière du maître supplémentaire lui confère une expertise didactique centrée sur les apprentissages fondamentaux qui permet de renouveler les pratiques communes. Ainsi de nombreux enseignant affirment qu’un co-enseignement régulier engage la dyade M+/MC à oser des situations plus complexes.

Un développement professionnel est alors rendu possible par le partage de situations d’enseignement-apprentissage, par l’analyses des pratiques. C’est en effet par l’analyse des contenus et des modalités de mise en œuvre que les situations d’apprentissages peuvent être renouvelées et solidifiées.
 
 Envisager des CP à 12 au détriment du PQMQDC :  

– C’est s’écarter du co-enseignement. Ses bénéfices sont donc à nouveau dilués voire perdus et un enseignant-une classe est à nouveau remis au devant de la scène.

– C’est  aussi laisser penser que le professeur peut conserver sa posture centrale de distributeur de parole et d’évaluateur des réponses des élèves. Il n’y a en effet pas de nécessité de modifier les pratiques “ordinaires” où souvent les interactions entre élèves ne sont pas prioritaires. 
 
 
Effets sur les équipes (faire école)  

Le dispositif “plus de maîtres que de classes”  a conduit les équipes à  hiérarchiser des priorités d’actions intensives au cycle 2; avec des aides ponctuelles et massées sur le cycle 3 qui ont aussi permis de fédérer l’ensemble de l’équipe d’école, et des interventions préventives en fin de cycle 1 pour articuler grande section et CP. Ce dispositif  engage par là-même à une recollectivisation de la difficulté scolaire dont la responsabilité n’incombe pas seulement au seul enseignant de chaque classe, mais à l’équipe enseignante qui en fait collectivement l’un de ses objets de travail. Du fait de la disponibilité du M+ désengagé de la responsabilité quotidienne d’une classe,  il permet de construire un rôle d’interface dynamisante entre équipe, direction et circonscription. Enfin il  amorce une nouvelle dynamique dans les équipes parce que le M+ est passeur (va de classe en classe) et pollinisateur (contribue au tissage entre classes et à l’harmonisation des pratiques).
 
 Envisager des CP à 12 au détriment du PQMQDC :
 
– C’est une recentration vers l’éternel “1 maître = une classe” sans plus d’échanges pour confronter ses pratiques.

– C’est remiser la dimension “travail collectif”, tout comme le travail conjoint. 

– C’est augmenter le nombre de classes de cycle 2, avec le risque de faire le choix de regroupement d’élèves homogènes (mettre ensemble dans une classe de CP les élèves les plus en difficulté). 

– C’est ne pas rendre nécessaire l’élaboration d’un plan collectif de cycle 2 et d’école et rompre alors avec la continuité des parcours d’élèves.
 
 
 Après avoir expérimenté le dispositif “Plus de maîtres que de classes” nous nous inquiétons donc de lui voir substituer “Moins de salles de classes que de maîtres” ou « Plus de classes que de salles de classes » !
 
Nous sommes favorables à une réduction générale des effectifs, mais nous ne souhaitons pas que le dispositif “Plus de maîtres que de classes” serve de réservoir de postes et préférerions la pérennisation de celui-ci afin de pouvoir en mesurer les effets à moyen terme. Détricoter  un dispositif dans lequel les enseignants se sont fortement engagés et qui montre ses premiers effets sur la réussite des élèves nous semble précipité. Le temps de l’école n’est pas celui du politique et les enseignants ont besoin de sérénité pour accomplir leur mission. 
 
signataires : 

Charlotte Bruno (PDMQDC 56), Nabila Errami (PDMQDC 64) Lucie Gillet (PDMQDC 44), Julie Meunier (PDMQDC 89), Céline Souleille (Prof des écoles REP 33), Camille Fischer (PDMQDC 78), Anne Christyn (CPC 64), Guillaume Caron (formateur éducation prioritaire 62), Ben Aïda (prof des écoles REP, Maitre formateur, 11), Viviane Ghesquière (conseillère pédagogique 32), Sylvaine Borel (coordo REP+ 41), Valérie Quevaine (Rased E 76), Vincent Gomez (Prof d’école remplaçant 46), Emmanuelle Perrier (prof des écoles REP+ 13), Patricia Simard (directrice et coordo REP 89), Émilie Morin (Prof des écoles REP+ 44), Christelle Lecoeur (Prof des écoles, 11), Coralie Bouvard (PDMQDC 25), Armelle Legars (Prof d’école REP+, maître formatrice, 44), Alizée Couturier (PDMQDC 89), Morgan Vincent (PDMQDC 01) , Morgane Morice (prof d’école coordo REP+ 44), Ophélie Evrard (PDMQDC 07), Christel Boutier (PDMQDC 50),  Sylvie Guffond (Conseillère pédagogique 74), Marc Bouvier (PDMQDC 59), Benoit Foissy (Professeur des écoles 89)

Soutenus par :
Soutenus par : 
Marie Toullec-Théry (Maitre de conférences, Université Nantes 44, CREN), Patrick Picard (Centre Alain Savary, IFE Lyon), Roland Goigoux (Professeur à l’Université de Clermont Auvergne, Laboratoire ACTé), Christine Félix (Maître de conférences ERGAPE, Université Aix Marseille et Espé), Sylvie Cèbe (Maitre de conférence à l’Université de Clermont Auvergne, Laboratoire ACTé), Dominique Bucheton (Professeur Honoraire des Universités, ESPE de Montpellier), Isabelle Lardon (GFEN), José Puig (Directeur, INS HEA), Christian Deghilage (président de l’ANCP), Fanny Delahaye (Chercheuse en psychologie cognitive, Espé de Bretagne), Philippe Tremblay (professeur, Université de Laval, Québec, Canada), Anne Trémant (Conseillère pédagogique 44), Eric Sonzogni (Conseiller pédagogique 74), Claire Winder (ESPE 06), Virgine Mazé-Giordano (Formatrice Espé de Nantes 44), Lucie Desailly (IEN et formatrice Espé de Nantes 44), Sylvie Chatellier (Conseillère pédagogique 44), Georges Férone (Maître de Conférences, CIRCEFT, Université Paris-Est Créteil et Espé), Corinne Marlot (professeure, HEP Lausanne (Suisse)), Alain Müller chargé d’enseignement ( Université de Genève (Suisse)), Renaud JAVELLAS (formateur en sciences de l’éducation à l’ESPE-Université Grenoble-Alpes de Grenoble), Anne Gombert (Maître de conférences, Psyclé, université d’Aix-Marseille et ESPé), Christophe Roiné ( maître de conférences, DAESL, Université de Bordeaux), Catherine Goujon (Formatrice Espé de Rennes 35), Anne Henry, (PE, Loqueffret 29), Véronique Durand (CPC Bourges 18), (Claire Godard, CPC, Châteaubriant 44), Isabelle Matéo (PDMQDC, 44), Pascal Sientzoff (chargé de mission pour l’éducation prioritaire au CAREP de Reims 51), Françoise Carraud (maître de conférences en sciences de l’éducation, Lyon II), Lucie Boué (CPC, 32), Viviane Ghesquière ( CPC 32), Valérie Lussi Borer (maitre d’enseignement et de recherche, Université de Genève, Suisse), Philippe Watrelot (professeur ESPÉ-Paris – ancien Pdt CRAP-Cahiers Pédagogiques) , Francette Popineau/Christian Navarro/Régis Metzger (co-secrétaires généraux du SNUipp-FSU), Catherine Nave-Bekhti (secrétaire générale du Sgen-CFDT), Paul Devin (secrétaire général du Syndicat National des Personnels d’Inspection SNPI-FSU), Stéphane Crochet (secrétaire général du SE-Unsa), Patrick Roumagnac (secrétaire général du Syndicat de l’Inspection de l’Éducation Nationale SI.EN UNSA), Bruno Robbes (Maitre de conférences Université Cergy-Pontoise, Laboratoire EMA), Jean-Yves Rochex (Professeur, Université Paris 8 Saint-Denis), Laurence De Cock (chercheuse en sciences de l’éducation, université Lyon 2), Roseline Ndiaye (présidente du CRAP-Cahiers pédagogiques), Marc Daguzon (maître de conférences, Université de Clermont Auvergne et ESPE, Laboratoire ACTé), Jacques Bernardin (Président du GFEN), Teresa Assude (Professeur, université d’Aix Marseille), Marc Douaire (Président de l’OZP), Rémi Brissiaud (maître de conférences honoraire en psychologie cognitive, Université de Cergy-Pontoise), Françoise Lantheaume (Professeur des universités sciences de l’éducation, Université Lumière Lyon 2), Aliette Vérillon (psychologue, ingénieur de recherche, IFE/École Normale supérieure de Lyon, CERLIS/université Paris-Descartes, UMR ADEF/université Aix-Marseille), Brigitte Belmont (maître de conférences, CERLIS, Université Paris Descartes), Godefroy Lansade (docteur en sciences de l’éducation, Formateur Espé, Draguignan), Laurence Espinassy (MCF, Aix Marseille Université-ESPE, Laboratoire ADEF, équipe ERGAPE)…

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