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Recherche action !

C’est un petit texte d’à peine une trentaine de pages, mais dont le lecteur n’est pas prêt d’épuiser la richesse et la portée…

Intitulée École ouverte recherche-action société éducative et signée Raymond Millot, cette brochure de l’Association française pour la lecture retrace l’aventure éducative menée dans le quartier de la Villeneuve à Grenoble entre 1972 et le début des années 2000. Si cette lecture vaut le détour, c’est que le texte ne se limite pas à établir l’histoire et la chronologie de cette expérience mais cherche avant tout à transmettre les enseignements et les acquis de cette démarche dans l’espoir de passer le relais à d’autres. L’ouvrage est ainsi rythmé par une série de pistes sur les apports et « les avancées susceptibles d’être reprises et améliorées par de nouvelles recherche-action. »

Pour les plus anciens, le quartier de la Villeneuve à Grenoble évoque le projet d’une utopie urbaine et architecturale lancée dans les années 60-70 pour, selon ses promoteurs, « transformer les rapports humains dans la cité. L’objectif essentiel (consistant) en la prise en main par les usagers des divers équipements socio-éducatifs et socioculturels qui sont mis à leur disposition. ». Pour les plus jeunes, la Villeneuve ce sont les émeutes de 2011 et le fameux discours de Sarkozy en 2012…

Quant à l’aventure présentée ici, elle a commencé avec le projet d’une « école ouverte » intégrant les « Maisons de l’enfance », les écoles, le collège de secteur, la formation continue et les institutions culturelles du quartier. Une équipe d’architectes propose de réinventer l’école et d’inscrire cette ouverture dans l’espace : pas de cours de récréation, pas de clôtures, mais un parc de 19 hectares sur lequel donnent les portes des classes. La rentrée se fait sans rang ni sifflets et les déplacements au sein des bâtiments sont libres.

Cette ouverture se fait aussi en direction des parents, définis comme des co-éducateurs, car, comme l’écrivait Fernand Oury « avec les parents, tout est possible. Sans les parents, on peut également agir. Contre les parents, on ne peut rien faire ».

Cette ouverture, c’est aussi celle sur le quartier et le monde, mais également au sein de l’école quand il s’agit de faire voler en éclat les classes en mélangeant les âges, en instaurant le tutorat ou en abandonnant les structures ségrégatives pour accueillir tous les enfants ensemble et poser comme principe de base l’hétérogénéité.
Impossible de résumer toutes ces pratiques. On notera pêle-mêle la création d’une radio d’élèves diffusée en classe tous les matins, un journal intitulé Des enfants s’en mêlent, des « classe nature » autogérées et le fait que « l’obsession des contrôles, notations et comparaisons, utilisation des stimulants artificiels (punitions et récompense) sont exclus » comme le précise la Charte du projet.
Du côté enseignant, il s’agit, pour les initiateurs, de passer du statut « de fonctionnaire exécutant infantilisé, sous la surveillance d’une hiérarchie le plus souvent normalisatrice à celui d’enseignant chercheur coresponsable d’un projet collectif. »

Toutes ces transformations n’ont été rendues possibles qu’à travers la mise en œuvre d’une « recherche-action », épaulée par l’AFL, c’est-à-dire de « recherches dans lesquelles il y a une action délibérée de transformation de la réalité ; recherches ayant un double objectif : transformer la réalité et produire des connaissances concernant ces transformations. »

Comme je le disais en ouverture, difficile d’épuiser ou même de résumer ce texte, je laisse alors la parole à Jean Foucambert qui signe la postface de cet ouvrage en vous restituant les quelques lignes qui concluent cette brochure : « Les conditions de production des transformations pédagogiques expérimentées ont ainsi été au moins aussi déterminantes que leur nature. Conférer à l’école la fonction de lutter contre les divisions établies dans la société entre tâches de conception et tâches d’exécution implique de la pourchasser dans son propre quotidien d’enseignant. Ce qu’on a nommé Recherche-action n’est alors qu’une anticipation de ce que sera le Travail dans une société libre… »

Grégory Chambat

Ce texte est celui de la chronique radio de l’émission de la CNT éducation du 12 novembre 2013 à télécharger sur le site de Q2C.


École ouverte recherche-action société éducatrice, Raymond Millot, éditions de l’Association française pour la lecture, octobre 2013, 37 p.
À commander à : AFL, 65, rue des Cités 93300 Aubervilliers, 01 48 11 02 30, afl@lecture.org, www.lecture.org

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