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Paulo Freire : « La formation des enseignants »

Entre 1989 et 1991, Paulo Freire accepte la responsabilité de l’éducation de la ville de Sao Paulo, administrée alors par le Parti des travailleurs. Dans un entretien, repris dans l’ouvrage Educacão na Cidade [Education en ville], il présente les grandes orientations qu’il espère mettre en œuvre au sein de la formation des enseignants :

Il y a six principes de base dans le programme de formation des enseignants dans ce secrétariat :

1) L’éducateur est le sujet de sa pratique, il l’accomplit en la créant et en la recréant

2) La formation de l’enseignant doit lui donner des outils pour qu’il créé et recrée sa pratique à partir d’une réflexion sur son quotidien.

3) La formation de l’éducateur doit être constante, systématique, parce que la pratique se fait et se refait de manière constante.

4) La pratique pédagogique requière la compréhension de la genèse propre à la connaissance c’est-à-dire comment s’effectue le processus de connaissance.

5) Le programme de formation des enseignants est la condition de possibilité d’une réorientation des programmes de l’école.

6) Le programme de formation des enseignants doit avoir comme principes de base :
– la description de l’école que l’on veut et qui est l’horizon de cette nouvelle proposition
– la nécessite de donner des éléments de formation de base aux enseignants dans les différents domaines de la connaissance humaine.
– l’appropriation par les enseignants des avancées scientifiques de la connaissance humaine qui peuvent contribuer à la qualité des écoles.

Ce programme prend plusieurs formes. Seront privilégiés les formations que l’on fait à l’école même, avec des petits groupes d’enseignants ou avec des groupes plus grands résultant du regroupement de plusieurs écoles. Ce travail consiste dans l’accompagnement de l’action-réflexion-action des enseignants qui agissent dans les écoles. Il comprend l’explication et l’analyse de la pratique pédagogique en recourant à des études de pratiques qui requièrent une base théorique et une réanalyse de la pratique pédagogique, en s’appuyant sur la réflexion sur la pratique et la réflexion théorique.

Cela se concrétisera de différentes manières en particulier par le travail systématique des groupes de formation avec des maîtres de l’enseignement préscolaire et avec la coordination, de directeurs et de maîtres, qui travaillent dans l’alphabétisation.

[Freire explique ensuite comment il souhaite faire appel également à des enseignants à l’Université pour intervenir dans cette formation].

[…]

La priorité donnée à la « relation dialogique » dans l’enseignement, permettant le respect de la culture de l’élève, la valorisation de la connaissance qu’il amène et le travail à partir de la vision du monde de l’élève, est sans doute un des aspects fondamentaux sur lequel on doit appuyer la pratique pédagogique des maîtresses et des maîtres. Cette proposition est très sérieuse et très profonde parce que la participation de l’élève ne doit pas être entendue de manière simpliste. Ce que je propose est un travail pédagogique qui, à partir de la connaissance que l’élève amène, qui est une expression de la classe sociale à laquelle il appartient, il y ait un dépassement, mais non pour annuler cette connaissance ou lui en superposer une autre. Ce que je propose, c’est que la connaissance sur laquelle on travaille à l’école soit révélatrice et significative pour la formation de l’apprenant.

Cela ne doit pas et ne peut être fait seulement en déposant des informations dans la tête des élèves. C’est pour cela, que je répudie la « pédagogie bancaire » [transmissive] et que je propose une pédagogie critique-dialogique, une pédagogie du questionnement. L’école publique que je désire est une école où il y a des lieux consacrés à l’appropriation critique d’un savoir qui a du sens à travers une relation dialogique. C’est l’école qui stimule l’élève à questionner, critiquer, créer, où l’on propose la construction d’une connaissance collective, articulant le savoir populaire et le savoir critique, scientifique, par la médiation des expériences du monde.

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