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Intifada : chroniques de Véronique Decker (2)

L’été dernier, Véronique Decker nous avait accompagnés en proposant quelques unes de ses chroniques avant qu’elles ne soient publiées et rencontrent le succès que l’on sait (Trop classe ! Enseigner dans le 9-3, Libertalia).
Elle nous offre, pour ces deux mois de vacances, de nouveaux textes inédits à savourer tout au long de l’été…

Intifada

Le chantier de la rénovation urbaine est très loin d’être terminé. Maintenant que les tours ont été détruites, leur béton concassé, plusieurs immeubles vont être reconstruits. En attendant, des collines de gravats concassés ont été installées derrières des palissades.
Mais le collège ne fonctionne déjà plus, et les pré-ados s’ennuient. Alors, ce soir, bonne idée : ils ont escaladé les collines pour jouer aux cow-boys et aux indiens, in situ de ce magnifique terrain d’aventures. Pas besoin de flèches, les cailloux sont à disposition. Inutile de réfléchir, le mieux c’était de viser les voitures garées sur le parking. Quel parking ? celui de l’école.
Pas de chance pour eux, alors que l’étude finit à 18 h, il y avait dans l’école un réunion qui finissait à 17 h 45… La première instit arrivant sur le parking est de suite venue me prévenir.
Comme les enfants, je me glisse derrière la palissade par le trou qu’ils ont eux même créé. Je vois la jolie bande, fière d’elle, juchée sur les cailloux. Splendides et inconscients, ravis de leur mini intifada. Je crie, je tempête, ils reculent craignant tous d’être reconnus sans doute, car la plupart ont bien du passer un moment chez nous.
Un caillou de la grosseur du poing arrive dans la rue. Je m’effraie, car plus de cent élèves vont sortir de l’étude : un enfant pourrait être tué par des projectiles de cette taille. J’appelle la police, et deux voitures arrivent (prodige de la rénovation urbaine, depuis qu’il y a des rues, la police vient lorsqu’on les appelle…) ce qui finit d’effrayer les moineaux, courant par nuées, dans toutes les trouées qu’ils ont fait dans les palissades.
Il reste à espérer que cela les calmera jusqu’à la fête de l’école. Je ne voudrais pas finir l’année avec un accident grave. Mais j’espère qu’il y aura de la pluie demain, car c’est sans doute la meilleur alliée pour qu’ils restent chez eux.
La tension qui monte est palpable, et le recul constant des dates de vacances nous expose, car le lycée ne travaille plus, le collège ne travaille plus et nous sommes contraints de finir l’année scolaire hors cadre commun avec le secondaire.

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