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Des enseignements de La Cour de Babel

On peut tirer de ce beau film mille commentaires, un peu grinçants pour les uns (« l’exception qui confirme la règle »), un peu béats pour les autres (« la belle école française qui intègre »). On peut regarder aussi séquence par séquence et, dans un premier temps, retenir :

le moment où l’enseignante écoute les parents : émotion, complexité des situations et difficultés. Quand la langue fait barrage, les regards et les mimiques viennent à la rescousse, mais l’important c’est la parole des parents ; l’enseignante intervient aussi, mais jamais pour juger ;
le travail sur la langue au début : toutes les langues sont mises à égalité, c’est tellement curieux et intéressant cette variété humaine. Et ça facilite visiblement l’apprentissage de la langue locale ;
la discussion sur la religion : la pluralité des croyances les neutralise, d’où la question explosive d’une élève qui clôt le débat… pour en faire certainement démarrer un autre dans les têtes. Là, on est vraiment dans l’émancipation ;
la manière dont l’accusation de racisme de la part d’une élève est ménagée (« gérée » et « enrobée pour traitement ») par la prof’. Jolie leçon de « comment faire avec le ressenti discriminatoire ».
la façon dont les questions des élèves sont le socle du travail, au point qu’ « on devrait appeler la Terre : question », selon le mot d’une élève.

On ne peut pas s’empêcher de penser que ce film est aussi une excellente réponse implicite tant aux réacs de l’enseignement (l’enseignement efficace se fait avec les élèves et à partir de leurs questions) qu’aux xénophobes de tous bords.

Quant à ce billet, il ne s’adresse pas seulement à ceux qui ont vu le documentaire … mais aussi à ceux qui ne l’ont pas encore vu, en espérant que cette évocation ne soit pas trop mystérieuse, mais peut-être incitative…

J.-P. F.

3 Comments

  1. Michel JAVOUHEY

    Des enseignements de La Cour de Babel
    En plein accord. La classe d’accueil vécue au quotidien, c’est ça ; un modèle de pédagogie de l’écoute, de la tolérance et du respect qui permet d’aller vers un socle commun (ce n’est pas qu’un gros mot) à savoir la pratique d’une langue commune au service du vivre ensemble.

    Et que ceux qui doutent encore et pensent que nous sommes des ”bisounours” viennent nous rencontrer et passer du temps avec nous. Pour eux aussi notre porte est ouverte …

    M. Javouhey, Principal Clg Rameau Dijon : une classe d’accueil, 40 nationalités au collège (15% étrangers, 40 % originaires) et un plaisir immense d’aller au travail chaque matin, retrouver une équipe de profs ”fou dingues” qui intègrent ces mômes après la CLA et les emmène au DNB (plus value de 9 %!) et à la seconde.

  2. so

    Des enseignements de La Cour de Babel
    D’accord avec le texte de Jean-Pierre : dans une période où la laïcité n’est que trop souvent prétexte à laisser libre cours à la haine au lieu de nous appeler au respect et à la curiosité et où nous avons besoin de visages d’enfants pour nous rappeler que l’Autre est un peu aussi le même, ce film est bienvenu. On peut toutefois regretter les scènes où l’intimité des enfants n’est pas respectée, ainsi la remise des bulletins aux familles qui félicitent ou réprimandent leur enfant (sans hésiter à menacer d’un retour au pays avec excision et mariage forcé à la clé) devant la caméra et les gros plans constants sur les larmes à gogo, même lorsque les protagonistes essayent de cacher leur visage. Personne ne supporterait d’être filmé dans ces situation. Pourquoi, lorsqu’il s’agit d’enfants, cela ne choque-t-il pas ? Tous les êtres humains sont égaux, mais certains le sont plus que d’autres…

  3. VALEAU Alain

    Des enseignements de La Cour de Babel
    Désolé si je suis iconoclaste!
    La cour de Babel
    Nous avons vu et débattu de « la Cour de Babel », ce mardi soir 7 avril…
    Déception ! Beaucoup de compréhension envers ces jeunes, leur colère, leur envie d’apprendre pour s’en tirer, pas forcément s’intégrer… envers leurs familles pris dans un tourbillon de difficultés… Beaucoup d’admiration pour les progrès réalisés… Mais peu sur le projet global de la classe et particulier de chaque élève… Comme si le feeling et l’adaptation au jour le jour, au circonstance par circonstance dominaient, c’est nécessaire mais pas l’essentiel ! Je suis certain qu’une méthode éducative et pédagogique existe mais pas évidente.
    J’ai connu, pendant 40 ans, ces enfants « en difficulté », à mes débuts on disait « inadaptés » dans le melting-pot de mes classes spéciales, près des usines Renault de Boulogne (les enfants dans la journée), les adultes (le soir une fois par semaine) puis dans un grand ensemble toujours en région parisienne. Toujours en région parisienne, bien que directeur, j’ai souvent tenu des classes d’accueil, soit pour enfants du voyage, soit pour primo-arrivants non francophones…
    La compétence, l’implication totale de l’enseignant responsable de ces classes souvent ouvertes est primordiale, leur réussite en dépend, leur ratés aussi hélas. Mais, jamais, son travail n’aurait obtenu de résultats positifs (langage, intégration et départ vers une suite d’étude ou d’apprentissage), sans la collaboration de tous les enseignants de l’équipe, et la compréhension active des familles de l’école… Cette communauté, les autres professeurs notamment, est évoquée mais pas impliquée, c’est dommage…

    Nous avons vu un film de flashes, de coups de poings d’enfants qui se débattent, de solidarité et de conflits… Un film aux scènes attendrissantes comme le sont les espoirs des parents et celles des ruptures quand les relations fortes enseignants-élèves se terminent, mais c’est tout.
    Je pense à tous ces enseignants, toutes ces écoles qui agissent au quotidien pour accueillir, aider, motiver et donner des outils à tous les enfants en difficulté de tous ordres dans des classes ordinaires parfois (ça veut dire hététrogènes seulement) et surtout, surtout, au départ en maternelle… Peu d’éclairage sur les méthodes utilisées, peu sur le travail accompli. C’est vrai que c’est plus spectaculaire au collège, parce que les échecs, le vécu chaotique a trop marqué ces jeunes pour ne pas les rendre méfiants. La confiance est à rétablir, c’est fait dans cette classe mais il faut construire dessus, ça c’est un autre document sans doute…
    Si ce film doit attirer l’attention sur ceux qui mènent ce combat permanent… bravo, mais quand comprendra-t-on que l’Ecole, c’est d’abord un ensemble d’établissements de tous niveaux, tous profils, tous objectifs spécifiques qui, avant tous aménagements ont besoin d’être consolidés, adaptés, organisés en des équipes cohérentes autour de projets réalistes. Ça existe, mais reste le fait des bonnes volontés plus que d’une Volonté d’Education Nationale… L’école est toujours une loterie où la chance des élèves reste trop souvent un hasard.

    “… el l’Ecole renaîtra de mes cendres..”

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